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Le détachement

Le détachement est un sujet complexe qui ne s’approprie pas en un claquement de doigts. Il fait partie des expériences qui sont douloureuses pour nous puisqu’à la base, pour qu’il y ait détachement, il y a eu attachement, ce qui suppose de l’amour. C’est une expérience qui amène son lot d’émotions à caractère désagréable. En effet, il n’est pas rare de ressentir de la peine, de l’anxiété, du désespoir, de la colère, de la culpabilité, de l’hostilité, de l’apitoiement, de la panique, du regret et tellement plus encore.

Apprendre à accepter et gérer le détachement s’avère souvent salutaire pour tous ceux qui ont appris à le faire. Pourquoi? Parce que le détachement est une expérience inévitable en ce monde.

Du moment que l’on s’engage dans une relation quelconque, que ce soit amical, amoureux, familial, professionnel, il est sage de garder en mémoire, sans pour autant vivre en fonction de cela, que fin il y aura. Ce constat se veut une garantie, une certitude. Les seuls éléments qui nous échappent sont ceux qui se trouvent entre le début et la fin tels que la durée, la qualité de la relation, le type de fin (nouvelle association, déménagement, faillite, trahison, décès, promotion, fin de l’espoir de voir l’être aimé changer, etc.).

Le détachement de la nature par ses feuilles qui se détachent de l’arbre offre la possibilité d’un paysage magnifique et d’un renouveau tout aussi merveilleux; Le détachement émotif de l’être humain permet également un renouveau splendide.

Nous devons composer avec la perte dès le début de notre vie et ce, peu importe notre espèce. C’est une des règles qui régissent la justice en ce monde. Nouveau-nés, nous expérimentons différents types de pertes tel le contact permanent avec la maman et la chaleur et le confort du placenta. Nourrisson, nous expérimentons la perte par le retour au travail de la mère ou du père, par le retrait de la suce, etc. C’est ainsi que le fil du détachement se tisse tout au long de notre vie. Certes, les objets de perte diffèrent en partie, mais la perte demeure une constance sur notre chemin de vie. Il n’y a aucun moyen d’y échapper. Même isolé de tout contact, cette expérience se fait par une perte matérielle ou encore, une perte physique telle que perdre sa motricité. À la lueur de ce constat, il devient évident que d’apprivoiser le détachement et son lot d’émotions, est un cadeau à s’offrir pour améliorer sa qualité de vie et son état global.

Le concept du détachement inclus diverses composantes dont évidemment, les émotions, mais aussi les facteurs d’influences, les types de perte, les apprentissages, les effets collatéraux, et surtout, les changements personnels. Il importe de bien définir toutes ces notions puisqu’elles sont déterminantes dans la réussite du processus d’apprentissage qu’est celui de l’acceptation et de la gestion du détachement. À noter que dans le détachement, le deuil est inclus.

 

La perte

En premier lieu, il faut bien comprendre ce que signifie perdre. Une perte est une privation de ce qui avait de la valeur à nos yeux. Cela peut être de valeur affective, monétaire ou autre. Perdre ce qui compte (même si c’est un rêve ou encore un espoir) créer un vide, un espace, un trou. On peut lui donner différents noms, mais ce qui est sous-jacent à toutes ces émotions pénibles qui surgissent avec le détachement, c’est le manque qui est créé par la perte. Plus l’objet de perte avait de l’importance, occupait une grande place en nous, dans nos pensées ou dans notre vie, plus il est facile d’oublier que notre état, notre perception de cette expérience est temporaire. Nous oublions dès lors que la douleur finira par s’estomper et qu’il nous est possible d’accélérer le processus de guérison.

Guérir de la douleur occasionnée par la perte implique des notions capitales telles que l’accueil de la situation et de ses émotions, l’apprivoisement de l’absence, la révision de ses perceptions et pensées liées à l’événement, le réapprentissage de l’existence sans l’objet ou l’être perdu (ou la réalité qui peut être bien différente que l’espoir de changement entretenu durant plusieurs années).

La perte signifie pour la majorité d’entre nous la peur, le stress, l’inquiétude, le changement, la déstabilisation et la souffrance. Ce qui est souvent mis à l’écart en temps de souffrance liée au détachement, c’est les autres significations attribuables à la perte.

Le mot clé ici est changement. Il ne peut y avoir de perte, de détachement sans que cela amène un changement. Ce dernier peut être une nouvelle façon de vivre, un déménagement, une nouvelle carrière, un nouveau mari, un nouveau réseau social, etc., peu importe, le changement est là.

Le changement est certainement perturbateur puisque les repères connus sont modifiés. Bien sûr, les nouveaux repères deviendront à leur tour ceux qui seront sécurisants, mais une période d’adaptation est nécessaire. Le changement peut être perçu comme épeurant, dérangeant, pénible, etc., mais il représente également sinon plus, le défi, la nouveauté, l’apprentissage, l’évolution, les découvertes, une excellente occasion de développement personnel.

Très certainement, la perte peut provoquer des changements dans les rôles, les relations, les attentes et les objectifs de tout un chacun. Il arrive fréquemment que la perte entraîne un changement dans nos habitudes quotidiennes. Souvent, même les tâches les plus simples nous rappellent cette perte. De là toute l’importance d’apprendre à gérer, tolérer et enfin, accepter le détachement comme étant une capacité que nous possédons et qui finira par nous apporter des bienfaits. Bref, gérer le détachement est l’un des chemins sur la route du bonheur.

Il est évident que la perte peut entraîner un certain degré de souffrance personnelle. Ce degré de douleur dépendra en grande partie de certains facteurs tels que le contexte derrière la perte, le type de perte, l’incidence de celle-ci sur ma vie, ma personnalité, mes capacités d’adaptation, ma flexibilité cognitive, mes expériences passées, mes blessures non guéries (complètement ouvertes ou simplement sensibles), la disponibilité et la qualité de mes systèmes de soutien (famille, amis, professionnel, ressource spirituelle, collègues, etc.)

 

Les facteurs d’influence

Le contexte

Le contexte de la perte influence grandement la réaction face à celle-ci. Plusieurs exemples permettent de clairement voir la pertinence du contexte en situation d’apprivoisement du détachement.

Voici un exemple qui illustre bien l’influence du contexte : perdre son droit de conduite automobile peut être un terrible coup pour un individu qui vit dans une région dans laquelle il n’y a aucun accès à un service de transport en commun et où tout espace public (magasins, épicerie, pharmacie, institut bancaire, clinique médicale, etc.) est à une distance ne permettant pas la marche. La même perte, bien qu’importante, aura un impact différent pour quelqu’un qui vit dans un contexte contraire, où tout espace public est à courte distance et dans lequel est instauré un excellent service de transport en commun.

Il ne fait aucun doute que le contexte dans lequel se vit la perte provoquera plus ou moins d’émotions à caractère désagréable selon l’impact occasionné par le changement. Il est évident aussi qu’il y a interrelation entre le détachement, les émotions et le changement. Que la cause qui oblige le détachement soit de nature agréable ou non, cela ne fait aucune différence au fait qu’il y aura des pertes et une restructuration obligatoire. Développer des stratégies d’adaptation se veut essentiel dans une vie de sérénité et de bonheur.

La nature de la relation

La nature de la relation fait partie des éléments qui influencent fortement la gestion du détachement. Le type de relation est l’un des plus influents facteurs en ce qui concerne la réceptivité envers le détachement qui s’annonce. La perte d’une relation de type utilitaire entraînera possiblement des émotions de colère ou de déception. La perte d’une relation professionnelle peut entraîner des conséquences financières importantes qui peuvent susciter de l’inquiétude, de l’anxiété, du stress. La perte d’un animal adoré amène son lot de tristesse et d’impuissance. La perte d’un parent, d’un enfant, d’un conjoint engendre des réactions et des émotions bien différentes de la perte d’un ami ou d’une connaissance. Plusieurs autres éléments entrent en jeu en ce qui concerne la nature de la relation tels que le type de relation, la solidité des rapports, les souvenirs (bons ou mauvais) et le genre de séparation.

La personnalité

La personnalité d’un individu est constituée d’une multitude d’éléments tels que l’ADN, l’hérédité, le contexte socioculturel dans lequel il vit, l’éducation reçue, ses forces, ses faiblesses, ses compulsions, ses pensées, ses attitudes, ses croyances et ses mécanismes de défense. Tous ces éléments sont interreliés et sont d’une grande influence sur la gestion de nos émotions. En guise d’exemple, si j’ai développé la résilience (la capacité de rebondissement lors de coups durs) comme mécanisme de défense, je serai plus enclin à m’adapter facilement aux situations qui se présentent à moi et qui sont déstabilisantes. Par contre, si j’ai développé le retournement vers soi (les émotions sont dirigées vers soi, exemple la colère est traduite en une colère envers soi-même) en tant que mécanisme de défense, il est probable que j’implose si je suis confronté à une situation bouleversante comme le deuil, puisque cela implique bon nombre d’émotions à caractère déstabilisant.

Autre exemple qui illustre bien l’influence que les composantes de la personnalité peuvent avoir dans la gestion émotive liée au détachement est le suivant : si j’entretiens la croyance que ma douleur, voire ma détresse émotionnelle vient de la pression mise par mon environnement (travail, famille, amoureux, argent, etc.) et que cela fait en sorte que je n’ai aucun pouvoir de changer quoi que ce soit, il y a fort à parier que je me sentirai impuissant quant à la gestion de mes émotions et de la situation. Cela risque de me porter vers un état de passivité et d’être victime de mes émotions. D’un autre côté, si j’entretiens la croyance que je suis le maître de ma destinée, de ma vie, j’aurai tendance à prendre action et utiliser ma puissance personnelle pour gérer mes émotions ainsi que ma vie en général, ce qui m’aidera énormément à restructurer mon avenir sans l’objet ou l’être perdu.

Lorsque l’on prend le temps de décortiquer ces éléments, il devient impératif d’apprendre à se mieux connaître et à s’évaluer justement, c’est-à-dire par rapport à soi-même et non aux autres (le meilleur de moi-même versus le pire de moi-même, puis me situer dans cette échelle en temps x) afin de mieux déterminer les aptitudes que je possède qui me serviront d’allié. Une bonne connaissance de soi passe par une évaluation objective (donc sans jugement) de son mode de fonctionnement, de ses croyances (erronées ou constructives), de ses forces, de ses limites, etc.

Les expériences passées

Les expériences passées sont une source d’information à ne pas négliger puisqu’elles contiennent les données par rapport à ce qui a été aidant ou nuisible dans semblable situation auparavant. En ayant cette information, je suis en mesure de faire des choix plus éclairés en ce qui concerne l’attitude, la pensée ou l’action que je désire entreprendre dans la réalité avec laquelle je suis contraint de composer, puisque je possède la probabilité de son efficacité.

Cependant, en situation d’événements pénibles comme le détachement et le deuil, les expériences passées font souvent référence à des blessures non-guéries. Les expériences blessantes du passé sont comme du poison dans le corps, car elles empêchent l’être de fonctionner à son naturel, c’est-à-dire dans la confiance et l’amour.

Les pensées dirigées vers un passé douloureux sont énergivores, elles drainent l’énergie nécessaire au fonctionnement corporel. En ce sens, nous avons tous un grand intérêt à laisser aller le passé et faire la paix avec ses blessures. Pour cicatriser, j’ai grandement avantage à apprendre à pardonner (à autrui et à moi-même), à faire confiance à la vie (et à moi-même), à mettre mon attention sur les apprentissages que j’ai faits à travers ces expériences douloureuses, à vivre dans le moment présent, à être conscient et maître de la répartition de mon énergie vers ce qui me fait du bien.

Croire que la guérison et tout ce qu’elle implique tel que décrit ci-haut peut être rapide ou instantanée, est utopique. Être réaliste serait de dire que mon état affectif a mis un certain temps à se détériorer et qu’il y a une accumulation d’événements et d’émotions à l’intérieur de moi. Ce sont précisément ces éléments que je revois sous un autre angle lors de mon processus de guérison. Il est d’une haute importance de trouver un sens à mon vécu, car cela supprime tout effet de lourdeur, d’inéquité, d’injustice, de culpabilité, d’anxiété, de tourment, de colère et bien plus encore. Le sens permet l’acceptation qui elle, permet la sérénité.

Pour réussir à apaiser la douleur provoquée par le détachement, il est très aidant d’approfondir sa connaissance intrapersonnelle et développer une compréhension et une connaissance de la grande palette des émotions. Gérer ce type d’émotions c’est aussi savoir les identifier, les reconnaître, les nommer et les démystifier.

Le système de soutien

Le système de soutien sert de filet de sécurité lorsque des épreuves me frappent et risquent de me faire tomber dans le malaise. Ce filet de sécurité amortit la chute. Avoir un système de soutien actif est tout le contraire de l’isolement. L’isolement plonge la personne encore plus profondément dans ses émotions à caractère désagréable tandis que le système de soutien élève la personne au-delà de ses émotions pénibles pour une transition vers un état de sérénité. On compte parmi les éléments d’un tel système les parents, le conjoint, les amis, la famille, les collègues, les animaux (pour l’apaisement qu’ils procurent), les professionnels, les mentors, bref tout être susceptible d’apporter réconfort, empathie, compréhension, compassion, soutien. Bien sûr, plus il y a d’acteurs dans le système, plus ce dernier est utile.

Toutefois, il est à noter l’importance de bien choisir les êtres qui composent le système de soutien, car tous ne sont pas susceptibles d’être en mesure de nous offrir un soutien adéquat. À titre d’exemple, si je désire réaliser mon rêve de déménager en Australie, il est préférable que je ne consulte pas mon amie qui est totalement dépendante de moi, car elle risque fort d’essayer d’influencer ma décision en considération de ses émotions à elle. Se construire un système de soutien est important, utile, favorable à l’équilibre psychique, mais cela requiert une réflexion.

 

Les types de perte

Les pertes font partie du courant normal de la vie. Elles se manifestent sous différentes formes et surgissent à divers moments dans notre parcours de vie. Personne n’y échappe. Un individu sera confronté à différents types de perte et parfois même, plus d’une fois à des types semblables tels que la mort. C’est pour cela qu’il est essentiel d’apprivoiser le détachement. Par diverses formes de perte, on inclut ce qui se rapporte au physique, au psychologique, à la famille, à la liberté, à l’environnement social, au matériel, aux animaux et aux rôles sociaux de la personne. Nous tenterons ici d’éclaircir chacun de ces concepts.

La perte physique

La perte physique, c’est-à-dire le changement fonctionnel qui se caractérise par une modification importante sur le corps de la personne qui cause la perte d’un usage quelconque. Des changements corporels naturels reliés à l’âge entraînent généralement un certain ralentissement du fonctionnement. Outre le vieillissement, il est possible de voir réduit à un minimum l’usage de son corps par la maladie et de mauvais choix de style de vie. S’ajoutent à cela des ‘imprévus’ qui amènent des pertes dans la vie quotidienne comme, perdre l’usage de ses jambes après un accident. Sans l’ombre d’un doute si pareille chose vous arrivait, vous auriez un deuil à faire ne serait-ce que par rapport à votre mode de vie qui serait totalement différent. Autres exemples de pertes physiques : perdre la vue, perdre l’odorat, paralysie d’une partie du corps, amputation d’un membre du corps, etc.

La perte psychologique

La perte psychologique se rattache à une altération importante dans le fonctionnement habituel de l’individu, dû à une réaction ou au développement de problématiques de santé mentale. Il arrive à tout un chacun d’avoir des épisodes de petite déprime légère et passagère ou encore d’avoir de la peine suite à une grosse déception. Ici, ce que la notion de perte psychologique traduit est de nature handicapante. Par exemple, avoir un épisode psychotique (idées délirantes, hallucinations) réduit à son maximum la capacité d’une personne à fonctionner ‘normalement’ en société. La personne qui vit ce type d’épisode n’est plus en mesure de vaquer à ses occupations régulières. Elle perd l’usage de son mental et de son fonctionnement social. Un autre exemple de problème psychologique pourrait être une dépression majeure qui laisse la personne dans un état de passivité totale. Cette personne perd l’usage de presque toutes ses capacités.

La perte familiale

La perte familiale se traduit par différentes séparations possibles. Pratiquement aucune famille ne passe à côté du détachement. De nombreuses familles ont des membres éparpillés à travers la planète. La plupart d’entre nous connaîtront la mort d’un ou des membres de notre famille comme nos parents, nos grands-parents. On compte aussi parmi les pertes familiales les nombreuses séparations des parents, ce genre de situation suscite une réorganisation complète pour les adultes en cause, mais aussi pour les enfants qui doivent faire le deuil de la famille idéalisée. Un autre exemple de perte familiale autant pour le parent que pour l’enfant est le départ du nid familial de ce dernier. Malgré l’excitation éveillée par l’autonomie qui se manifeste, il n’en reste pas moins qu’il y a un deuil à faire de part et d’autre, car il s’agit quand même d’une séparation. Le quotidien comme on le connaît est bien différent.

La perte de liberté

La perte de liberté inclut aussi l’indépendance et l’autonomie. On parle de ce type de perte lorsqu’une personne est en situation où elle doit compter sur d’autres personnes pour ses soins personnels ou encore pour vaquer à ses occupations quotidiennes. Il est à souligner que le désir d’indépendance est important pour la grande majorité des individus. Lorsque cette sphère est menacée ou limitée, l’individu doit se préparer à faire le deuil de son autonomie et de sa liberté, qui pourtant sont un droit fondamental. Cette menace ou cette limite se manifeste par l’absence d’un logis adéquat, de maladies graves, de dispositions légales, d’une situation financière précaire. Si vous demandez à un adolescent quoi d’autre pourrait enfreindre sa liberté, il risque de vous répondre que vivre dans un milieu rural (peu de commerces, pas de transport en commun, peu de centres de divertissement, etc.) est un enjeu majeur à son indépendance. On pourrait citer en exemple une maladie dégénérative qui oblige l’hospitalisation. Un délit qui occasionne la prison ou une période de probation.

La perte liée à l’environnement social

La perte liée à l’environnement social est la réduction du réseau d’une personne. Que nous vieillissons implique que les gens autour de nous le font aussi. Il n’est pas rare en vieillissant que notre réseau social se rétrécisse étant donné qu’il y a plus de décès parmi les personnes âgées que parmi les jeunes. Le décès est aussi une cause majeure de perte pour les gens qui sont dans un réseau de toxicomanie et de gang de rue. Toutefois, le décès n’est pas la seule cause de détachement des gens de notre réseau social. Les déménagements, les trahisons, l’évolution différente de tout un chacun sont autant de facteurs qui font en sorte que certaines personnes se perdent de vue. Il y a de ces pertes qui sont plus douloureuses que d’autres, bien évidemment.

La perte matérielle

La perte matérielle inclut aussi la notion monétaire. Traiter ce type de perte peut possiblement paraître superficiel, mais la faillite amène une personne ou une famille dans un état précaire, ce qui n’a plus aucune connotation superficielle. Plusieurs détachements peuvent exiger d’être fait en pareille situation comme devoir quitter la maison dans laquelle nous avons habité toute notre vie. Perdre sa voiture peut impliquer que les enfants ne peuvent plus poursuivre leurs activités parascolaires, etc. Les pertes matérielles affectent le quotidien. Les enfants vivent des pertes matérielles régulièrement comme leurs mitaines, leurs jouets, etc. La perte matérielle fait aussi partie de la vie. Lorsqu’un parent meurt, l’on doit se détacher de ses biens et cela devient une perte importante puisque c’est tout ce qui nous reste de lui.

La perte des animaux domestiques

La perte des animaux domestiques est pour les amoureux d’animaux quasiment, sinon aussi douloureuse que la perte d’un membre de la famille. D’ailleurs, c’est souvent ainsi que les ‘propriétaires’ d’animaux définissent leur lien avec leur animal de compagnie. Lorsque cet être aimé a passé cinq, dix ou quinze ans avec nous, son départ provoque beaucoup de peine. C’est un être cher. Certaines personnes tissent des liens affectifs plus étroits qu’avec certains membres de leur famille ou qu’avec leurs amis. Un animal aime les gens de sa famille d’accueil inconditionnellement. Cela se fait rare parmi les humains. Il n’est pas surprenant que les gens s’attachent autant à ces bêtes.

La perte d’un rôle social

La perte d’un rôle social est un élément dont l’effet vient jouer sur l’identité qu’a une personne d’elle-même. Cela oblige une personne à se redéfinir. Plusieurs exemples peuvent illustrer ce constat. Premièrement, si je suis le parent d’un enfant unique et qu’il meurt dans un accident de voiture, vais-je avoir l’impression de ne plus être parent? Si j’ai travaillé toute ma vie et que je prends ma retraite, est-ce que je vais me questionner sur mon apport communautaire? Si j’ai été étudiant durant quinze ans (maternelle à doctorat) et que j’entre sur le marché du travail, mon statut va changer. Une personne se définit à travers sa personnalité certes, mais aussi à travers les différents rôles qu’elle joue dans la société. Perdre son rôle peut affecter une personne dans son estime personnelle.

La perte de la vie telle qu’on la connaît jusqu’à maintenant

La perte de la vie telle qu’on la connaît jusqu’à maintenant est sans doute très déstabilisante, car l’individu y perd tous ses repères. Cette perte se vit en parallèle de tous les autres types de perte énumérées jusqu’à présent puisque toute fin amène un changement dans la façon de vivre par exemple on ne fait plus la visite du dimanche, on a plus une telle personne à téléphoner en cas de besoin, on n’a plus le même médecin si l’on est déménagé pour affaires dans un autre pays, etc. Ce qu’il faut garder en tête c’est que la vie telle qu’on la connaît peut basculer à tout moment. D’un angle plus positif, on pourrait citer en exemple l’annonce d’une grossesse, d’une promotion, l’obtention d’un diplôme, etc. Parfois, il ne suffit que de quelques secondes.

La perte d’un rêve

La perte d’un rêve peut être illustré par des exemples liés à des pertes physiques comme s’entraîner depuis bon nombre d’années pour les Olympiques et être victime d’un accident qui nous fera perdre l’usage de nos jambes ou encore, commencer à se faire une renommée en tant qu’artiste peintre et perdre la vue. C’est pour cette raison que si votre rêve vous est vraiment important, il serait peut-être sage de tenter de le réaliser sans tarder et sans précariser votre situation actuelle.

La perte d’un idéal

La perte d’un idéal est liée à l’idée qu’une personne s’était faite de sa vie ou de certaines composantes de sa vie. Par exemple, l’enfant qui avait projeté avoir des parents unis pour la vie, mais qui lui annoncent leur divorce. Autre exemple : aspirer à faire de longues études universitaires en médecine et se faire diagnostiquer des troubles d’apprentissage. Il importe d’essayer en tout temps d’être le plus réaliste possible et pour ce faire, il faut miser sur ce qu’on a du pouvoir, c’est-à-dire ce qu’on met en place dans sa propre vie à partir de nos forces et limites personnelles.

La façon dont se coupe le lien qui nous unissait à l’objet ou l’être perdu a aussi une influence sur les sentiments qui émergeront en nous à la suite de l’événement.

 

Les types de fins

La fin brusque et non désirée, c’est-à-dire l’événement inattendu et surtout, non provoqué. On parle ici d’accidents, de mort subite comme un arrêt cardiaque, du conjoint qui demande le divorce alors que l’autre partenaire n’avait vu aucun signe préliminaire, etc. Ce type de fin est défini à partir du point de vue de la personne qui subit sans l’avoir choisi. Il est d’une évidence incontestable que ce genre de situation précipitera la personne dans un état de choc. Le choc étant la première étape à franchir dans le long processus de deuil. 

La fin provoquée, soit celle que l’on a demandée ou fait arriver. La séparation amoureuse en est un excellent exemple. Ce type de fin est défini à partir du point de vue de la personne qui a fait le choix de mettre un terme à la relation ou à la situation. Un autre exemple pourrait être la personne qui a commis des délits sachant très bien qu’il y avait risque de conséquences et qui se retrouve derrière les barreaux. On pourrait aussi parler de l’individu qui a commis l’infidélité qui a provoqué la rupture du couple. De l’enfant qui sans cesse agresse (verbalement, physiquement, financièrement) ses parents et qu’un jour, ces derniers choisissent de se respecter eux-mêmes et mettent fin à la relation. Ce genre de situation stimule en général un sentiment de culpabilité chez la personne qui se sent responsable de la peine inculquée à autrui et à lui-même.

 

Les apprentissages

Dans toute expérience, il y a un apprentissage. La première fois que je me suis brûlé en touchant le feu d’une chandelle, j’ai appris que cela faisait mal. Mettre son attention sur l’apprentissage donne un sens et un but à la vie, facteurs essentiels au bonheur et à la sérénité. En traitant les pertes de la sorte, l’on se découvre des forces et des capacités insoupçonnées. Non seulement la douleur s’estompe, mais l’estime de soi augmente.

Dans le cas de perte par décès ou de séparation imposée, il importe de réussir à identifier les legs et les héritages que l’être qu’on a perdu nous a transmis. C’est en se demandant : « qu’est-ce que cette personne m’a apporté? » que l’on arrive à trouver l’apprentissage, l’héritage et ainsi donner un sens à cette expérience. J’arrive à voir le positif qui ressort de cette expérience. Par exemple, l’être que j’ai aimé m’a appris à aimer et à rire, non pas à focaliser sur la douleur et la souffrance. Cette personne m’a-t-elle appris à surmonter les épreuves? Il est rare d’observer que quelqu’un lègue le désespoir. C’est mon interprétation des événements qui créent le désespoir, ce n’est pas ce que la personne a souhaité pour moi.

D’autres apprentissages peuvent avoir eu lieu par exemple, dans une relation amoureuse. J’ai peut-être appris à m’affirmer ou encore, j’ai appris que je ne veux plus vivre avec une personne colérique. J’ai appris des choses qui me seront utiles pour le choix d’un futur conjoint. Toute relation, qu’elle soit familiale, amoureuse, amicale ou professionnelle amène son lot d’apprentissages de part et d’autre. Afin de mieux comprendre ce principe, il est possible de faire l’exercice en demandant aux gens de votre entourage ce qu’ils ont appris de vous.

 

Les effets collatéraux et les changements personnels

Lorsque les émotions ne sont pas gérées, des symptômes psychosomatiques (malaises intérieurs extériorisés par le corps) peuvent apparaître tels que des douleurs abdominales, des migraines, des ulcères d’estomac, des maux de dos, etc. Ne jamais hésiter à consulter et ne jamais prendre cela à la légère. Ces symptômes sont des indicateurs pour vous aider à comprendre l’importance de traiter différemment ce que vous vivez.

Le chagrin se manifeste à plus ou moins grande intensité lorsqu’il y a détachement à faire. Lorsqu’il y a plusieurs pertes en peu de temps, il est possible d’avoir une surcharge de chagrin. Il arrive que cela se traduise par une déprime, voire une dépression, la maladie, une grande fatigue. De façon générale, tout cela est temporaire et on finit par se ressaisir. Toutefois, il arrive qu’une personne n’y arrive pas, dans tel cas l’aide professionnelle est une nécessité.

Toutes les relations restantes peuvent être remises en question, des inquiétudes peuvent y être rattachées. Par exemple, une personne peut avoir peur que toutes les personnes qu’elle aime meurent, ou encore que tous ses futurs conjoints la quittent. Dans tel cas, il faut apprendre à nuancer.

La culpabilité fait presque toujours partie du deuil. La plupart des gens se questionnent : « Est-ce que j’aurais pu faire quelque chose? Aurais-je pu éviter la tragédie? » La culpabilité n’a jamais raison d’être si l’intention derrière la situation n’était pas de faire nuisance. Puisque la culpabilité est un puissant poison, il devient impératif d’aller chercher de l’aide pour réorganiser ses perceptions et ses croyances qui provoquent cet état. La personne déchirée par le détachement n’est certes pas objective. Pour avoir une lecture neutre de la situation, elle doit recourir à quelqu’un d’extérieur.

Bien qu’il y ait des effets collatéraux à caractère déstabilisant, il y en a aussi à caractère stimulant. La création de nouvelles relations en est un parfait exemple. Il n’est pas rare que la perte vécue fasse en sorte que l’individu transforme son réseau, son environnement. Par exemple, une personne qui se sépare en profite parfois pour faire d’autres grands changements tels qu’un retour aux études. Dans cet exemple, il est très possible que la personne en question se fasse de nouveaux amis. Autre illustration possible de ce fait est l’exemple d’un couple ayant perdu un enfant par la maladie qui joint un groupe de soutien. Ils noueront certainement de nouvelles relations.

La réaction physique ou émotionnelle d’une personne au détachement est propre à chaque individu. Il n’y a pas de bonne façon de se sentir. Par contre, il y a des sentiments qui peuvent détruire quelqu’un qui ne bénéficie pas de l’aide pour se sortir de son état de mal-être. Il en revient à chacun de trouver sa façon de traiter la perte. Pour ce faire, il peut s’orienter vers la réflexion, la méditation, la spiritualité, la thérapie, les groupes de soutien, la famille, les amis, etc. Chose certaine, sans l’acceptation de la douleur et des autres émotions, le processus de détachement sera pénible et long.

Nous n’avons souvent pas le choix des pertes, mais nous avons toujours le choix de la façon de les analyser et de les traiter. Ne pas entretenir de fausses croyances par rapport à la perte par exemple, << les gens que j’aime sont immortels>> et accepter que le détachement fait partie de la vie, vous sera d’une grande aide le moment venu. Cela vous permet en quelque sorte de vous préparer à cette éventualité. Il vous sera dès lors plus facile de puiser dans vos ressources pour faciliter votre processus. Renseignez-vous sur les situations auxquelles vous êtes confronté, car comprendre ce qui se passe, rend la situation beaucoup moins effrayante.

 

Source : Émo-Contrôle : programme de gestion des émotions, Éditons Québec-Livres, 2013, 175p.
Au revoir : apprendre à gérer la douleur du détachement, fascicule de formation, Gabrielle Brind’Amour, 2015.

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